Le Liban a élargi ses enquêtes sur l’explosion à Beyrouth
Le Liban déterminé à punir les responsables de l’explosion sur le port de Beyrouth. ©Tasnim
Le Liban a élargi ses enquêtes sur l’explosion à Beyrouth. Le premier niveau de l’enquête porte sur la période allant du dépôt en 2013 des centaines de tonnes de nitrate d’ammonium hautement explosif dans le hangar 12 du port de Beyrouth jusqu’à aujourd’hui. À ce stade, l’enquête a démarré auprès de 23 personnes, dont les plus éminentes sont Hassan Koraytem, président du conseil d’administration du port, Chafic Merhi, ancien directeur général des douanes, et Badri Dhaher, actuel directeur général et d’autres employés de ce port.
Cette étape de l’enquête prévoit de trouver des réponses à des questions importantes. Étant donné que la loi libanaise interdisait l’entrée de cette cargaison dans le port de Beyrouth, comment se fait-il que cette grande quantité de nitrate d’ammonium se trouvait sur ce port ? Étant donné que cette cargaison valait plus d’un million de dollars, est-ce qu’il y a eu une décision portant sur la revente de cette cargaison ?
La deuxième étape de l’enquête évoque une négligence et la troisième phase de l’enquête examine l’hypothèse d’une attaque israélienne utilisant un missile ou une bombe, c’est pourquoi le président libanais Michel Aoun a demandé à son homologue français Emmanuel Macron de fournir au Liban des images satellites du site où l’explosion a eu lieu. Si la France ne donne pas suite à cette demande, Beyrouth le demandera auprès d'un autre pays.
Les enquêtes s’effectueront auprès des directeurs et des responsables du port. L’appareil anti-espionnage du Liban avait testé des échantillons de cette cargaison début 2020 et a constaté que ces matériaux étaient hautement dangereux. Le service de renseignement libanais a demandé aux autorités d’agir au plus vite en raison de la dangerosité du stockage. Il avait averti que les matériaux pourraient être volés par des groupes terroristes et utilisés pour fabriquer des bombes.
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« Toute la vérité doit être révélée sans considération aucune pour quel que partie que ce soit. »
Les services de renseignement libanais sont arrivés à cette conclusion que les enquêtes menées par le service de contre-espionnage libanais ont également montré que l’un des murs du hangar 12 du port de Beyrouth avait été démoli. Le contre-espionnage libanais avait également averti que les matériaux pourraient exploser à cause de la chaleur et détruire le port.
En 2015, l’armée a chargé un expert militaire de prélever des échantillons de ces matériaux et d’effectuer les tests nécessaires à l’Académie industrielle. Après avoir effectué ces tests, cet expert a annoncé que le pourcentage d’azote (qui est considéré comme un explosif) dans cette cargaison atteint 7,43 %. Alors que le pourcentage autorisé pour l’importation de nitrate d’ammonium destiné à être utilisé dans les engrais agricoles ne doit pas dépasser 11 %. Dans son rapport à l’armée libanaise, le contre-espionnage libanais a également conseillé que le sort de cette cargaison soit déterminé, et ce, en la réexportant vers un autre pays.
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Par ailleurs, une source judiciaire libanaise a déclaré que la portée de l’enquête judiciaire sur l’explosion sur le port de Beyrouth s’est élargie et comprenait des hauts fonctionnaires.
« Les diverses hypothèses, dont celle d’acte terroriste, feront l’objet d’une enquête sur l’explosion dans le port de Beyrouth. Cette enquête visera également les hauts fonctionnaires », a précisé cette source judiciaire libanaise.
« Ces trois derniers jours, 21 personnes ont été arrêtées et interrogées. Le nombre d’arrestations augmente, et des cadres de haut rang seront bientôt inclus », a-t-elle ajouté.
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Cette source judiciaire indique : « Le personnel et les travailleurs du port ne sont pas les seuls responsables. Les hauts fonctionnaires du port de Beyrouth, y compris le directeur général du port, les autorités des douanes, les responsables de la sécurité portuaire, ainsi que tous les ministres et politiciens sont concernés. Ils étaient tous au courant de la présence de substances dangereuses dans le port. »
« Toutes les personnes arrêtées étaient au courant de la présence de substances dangereuses et explosives dans le port de Beyrouth et savaient que le stockage à long terme de ces substances serait dangereux », a ajouté le responsable de la justice libanaise.
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Une autre source de sécurité libanaise a pour sa part déclaré à Charq al-Awsat que l’hypothèse de l’explosion d’un entrepôt de missiles était très improbable et que les experts libanais et français ont eu accès à des images qui montrent que les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrant le tir d’un missile sont fausses.
Cette source de sécurité n’exclut pas cependant la possibilité d’une opération de sabotage. « L’hypothèse selon laquelle le nitrate d’ammonium a explosé à la suite d’un soudage dans un entrepôt n’est pas exacte, car le nitrate ne s’enflamme pas facilement et a besoin d’une température de 220 degrés pour s’enflammer », a-t-elle précisé sous le sceau de l’anonymat.
« L’enquête est basée sur deux hypothèses principales : l’une est qu’une substance ou un objet à haute température est entré dans l’entrepôt, et la seconde est la possibilité d’un acte terroriste. Les experts privilégient la deuxième hypothèse », a-t-elle indiqué.
« Le stockage de nitrate d’ammonium de 34,7 % doit être étudié très attentivement », a-t-il conclu. « Il y avait des matériaux inflammables et des fusibles explosifs dans l’entrepôt, et la possibilité que ces fusibles aient été attachés à une bombe à l'intérieur de l'entrepôt est l'un des cas qui renforce l’hypothèse d’un acte terroriste. »
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