Le poète palestinien Ashraf Fayad vient d’être condamné à mort pour apostasie par l’Arabie Saoudite.
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Le poète palestinien Fayad Ashraf a été condamné à mort pour "apostasie" par des juges d’Arabie Saoudite.
Il est lui est notamment reproché d’avoir publié un recueil de poèmes en 2007, Instructions internes, qui contiendrait des poèmes athées.
(Cette condamnation à mort intervient après une première condamnation à quatre ans de prison et 800 coups de fouets).
Une journée internationale de solidarité afin d’exiger Vie sauve et liberté pour Fayad Ashraf est prévue pour le 14 janvier prochain. (https://www.facebook.com/events/1711211815789497).
Une campagne de soutien a été lancée pour le sauver.
Signez la pétition : https://www.change.org/p/sauvons-le-po%C3%A8te-palestinien-ashraf-fayad-condamn%C3%A9-pour-apostasie-par-l-arabie-saoudite
Ashraf Fayad
Le poète palestinien Fayad Ashraf a été condamné à mort pour "apostasie" par des juges d’Arabie Saoudite.
Né en 1980 à Gaza, ce poète palestinien vit depuis de nombreuses années en Arabie Saoudite. Poète et artiste, il a représenté l’Arabie saoudite à la Biennale de Venise en 2013.
En août 2013, il est arrêté sur le soupçon de blasphème. Mais il est relâché le lendemain.
En janvier 2014, il est à nouveau arrêté. Il est lui est notamment reproché d’avoir publié un recueil de poèmes en 2007, "Instructions internes", qui contiendrait des poèmes athées. Et, sur la foi d’un seul témoignage, d’avoir tenu des propos athées dans un café d’Abha. O lui reproche de prôner des idées « destructrices » et de corrompre la jeunesse.
Il aurait aussi enfreint la loi sur la cybercriminalité car on a trouvé dans son téléphone des photos de femmes (ses amies).
Il est alors condamné à quatre ans de prison et 800 coups de fouets ; mais le tribunal ne retient pas l’accusation d’apostasie dont il se défend.
La Cour d’appel considérant que le repentir ne suffit pas et que le pardon ne peut être accordé que par Dieu, décide alors de le renvoyer devant le Tribunal général d’Abha.
Celui le condamne à mort par décapitation le 17 novembre dernier.
Depuis son arrestation, on lui a retiré sa carte d’identité et il n’a pas pu s’entretenir avec un avocat. (Il avait jusqu’au 17 décembre pour faire appel).
Quelques poèmes de Fayad Ashraf
Le remède
Tu démentiras toutes les informations
les revues de presse
les analyses des spécialistes
en dernier cri de la mode
Tu n’abuseras pas du sommeil
et du téléphone portable
Tu t’exerceras un peu
à la mort
Tu te débarrasseras de toutes les photos
que tu as gardées de ton enfance
de ton adolescence, de ta pauvreté
de ton ex-aimée
des contes de ta grand-mère
et de tes virées nocturnes
pour t’attaquer
à certaines prétendues vertus
Tu utiliseras de l’eau chaude pour ta douche
et te laveras les pieds
chaque fois que tu ôteras tes chaussettes
Tu feras tiennes les expériences
de ceux qui viendront après toi
Tu écriras ton nom à l’envers sur le miroir
Tu mangeras avec la main droite
et laisseras le reste
à ceux qui méritent plus que toi
ta bouche trempée dans
le pétrole
Logique
La vieille porte
applaudit le ballet du vent
avec les arbres
La vieille porte
n’a pas deux paumes
et les arbres
n’ont pas été
au conservatoire
Le vent est un être invisible
même quand il danse
avec les arbres
Corbeau volant sur deux bâtons
Dieu était sur son trône
écoutant les contre-louanges
et te punissant sans discontinuer
pour ton vol suspect
au-dessus des cadavres parfumés
Dieu sur son trône
Il a créé l’oiseau
et lui a appris à voler
à quérir sa nourriture
Il lui a appris
à chuter
toutes les chutes
interdites et permises
Dieu sur son trône
Et tu essaies maintenant
de réparer tes ailes
Tu es là
à apprendre une autre leçon :
ce qui t’a échappé
de ce que font les oiseaux
et de ce que l’on peut récupérer
d’un plumage ingrat
que l’eau n’a pas trop mouillé
Dieu sur son trône
Il te prive de la faculté de voler
pour que tu ne puisses pas
regarder à la dérobée
les terrasses des villes
peu habituées à ton envol
et pour que les cordes à linge
ne soient pas souillées
par tes crottes
Autre forme du cœur
Fais sonner la cloche
et débarrasse ton hiver
de ta triste chanson
Le disque repasse
et le magnétophone
ne souffre pas de l’humidité
« My funny Valentine∗ » repasse
Le saint au cœur percé d’une flèche
chante
Le saint chante et prie Dieu
de nous prémunir de tout mal
Dieu nous aime
Dieu nous éprouve
nous use
et nous demande des comptes
Il nous châtie
et parfois nous pardonne
Dieu, j’implore ton pardon
Je l’implore aussi pour toutes les femmes
et les amoureux, tous
Amnistie
Au-dessous de la ligne du silence
les moustiques sont très agaçants
On dirait qu’ils s’adonnent
au trafic du sommeil
dans ta cellule de prisonnier
comme si ta façon de dormir
était une violation flagrante
des accords de Genève
et autres traités internationaux
Retiens-toi
Tu ne peux pas pisser ici
Danse un peu
sautille
et trouble
la gravité des funérailles
Gare !
Le café aussi
est un diurétique
Je suis debout, tout nu
chaque jour
sans Jugement dernier
sans que personne
ne souffle dans le cor
car je suis d’avance
ressuscité
Je suis l’expérience de l’enfer
sur la planète Terre !
La terre
cet enfer apprêté pour… les réfugiés
Poèmes traduits de l’arabe par le poète marocain Abdellatif Laâbi, extraits du recueil Instructions internes, publié en 2007 chez Dar al Farabi, Beyrouth.