SID ALI KOUIRET EST DÉCÉDÉ HIER À L'HÔPITAL DE AIN NAÂDJA
Un monument du cinéma algérien disparaît
Par Saïd BOUCETTA - Lundi 06 Avril 2015
Taille du texte : 
Sid Ali Kouiret lors de l'une des nombreuses visites qu'il a effectuées à la rédaction de notre journal
L'Algérie perd l'un de ses illustres fils. Un artiste accompli. Un homme d'honneur, de grande générosité a fait ses adieux aux millions d'Algériennes et d'Algériens qui voyaient en lui toute cette Algérie fière, combattante et en même temps joyeuse. Sid Ali est mort. La culture est orpheline.
L'immense figure du cinéma algérien, Sid Ali Kouret, s'est éteint hier après-midi à l'hôpital militaire de Aïn Naâdja à Alger, des suites d'une longue maladie qui l'a amené à subir plusieurs interventions chirurgicales. Le défunt, né le 3 janvier 1933, avait 82 ans. Il est sans doute, l'un des comédiens les plus connus des Algériens, pour avoir, notamment campé des rôles devenus cultes, à l'image du personnage de Ali, dans le film L'opium et le bâton. L'expression «Ali mout Wakef» qui a traversé plusieurs générations, traduisant toute la philosophie de vie des Algériens, est sans conteste, l'une des scènes les plus célèbres du cinéma algérien. Il reste que le succès du film de Ahmed Rachedi, tiré du roman de Mouloud Mammeri, n'a fait que révéler le grand artiste qu'était Sid Ali Kouiret. Le grand comédien a réussi tout au long d'une très riche carrière à susciter l'admiration des amateurs de théâtre et les cinéphiles du pays. Sa propre vie est d'ailleurs un véritable scénario qui démarre sur une enfance difficile et une rencontre fortuite avec l'autre géant du théâtre national Mustapha Kateb. Nous sommes dans les années 1950. Le jeune Sid Ali, 17 ans, croise Mustapha Kateb. Sa vie est totalement bousculée. Il entre de plain-pied dans un monde qui lui ouvre les yeux sur le théâtre, lequel a été son école du patriotisme. Il intègre la troupe théâtrale du FLN. A partir de 1951, le jeune homme multipliait les expériences et se produisait à Berlin, Paris, Bucarest et passe professionnel dans la troupe de Mahieddine Bachetarzi, à Alger, avant de débarquer à Marseille, pour échapper à la DST qui suivait de trop près les activités de la troupe. Il rejoint le FLN à Paris où, en compagnie de Mohamed Boudia, Hadj Omar, Missoum et Nourreddine Bouhired, il met son art au service de la révolution. A la création de la troupe artistique du FLN, en 1958, Sid Ali en est l'une des «vedettes» et apporte sa contribution à la lutte de Libération nationale en parcourant le monde, dans des conditions, souvent difficiles. Une expérience qui forge l'homme de théâtre qu'il a toujours été et l'amène à poursuivre sur la même lancée au TNA. A partir de 1963, il renoue avec le public algérien, cette fois libre et indépendant, et montre des capacités artistiques hors normes. Très vite, il est repéré par le grand réalisateur, Mustapha Badie, qui adapte pour la télévision la pièce Les Enfants de la Casbah de Abdelhalim Raïs. Nous sommes en 1963. Le téléfilm remporte un succès phénoménal. Sid Ali Kouiret entre dans les foyers algériens et n'en sortira plus. Il a été adopté par tous ses concitoyens, dont nombreux ont pleuré lorsque, il a joué la scène de «Ali mout Wakef» dans L'Opium et le Bâton, en 1970. Immense dans l'interprétation du rôle, Sid Ali Kouiret a encore confirmé, une année plus tard dans Décembre, le film de Mohamed Lakhdar Hamina. On le cataloguait dans le drame, le grand comédien déroute son monde en interprétant brillamment son rôle dans la comédie, L'évasion de Hassan Terro de Mustapha Badie. Il aligne les rôles à succès dans de nombreux autres films, à l'image de Chronique des années de braises de Hamina et Les marchands de rêve de Mohamed Ifticène, tiré d'une enquête journalistique de Ahmed Fattani sur les milieux artistiques à Alger. Là aussi, son grand talent d'acteur a permis au public algérien de découvrir une autre facette de son jeu d'acteur sublime. D'ailleurs, confie le directeur de L'Expression, «de ce film est née une amitié profonde entre nous deux. Je garde de mon ami le souvenir d'un homme généreux et un artiste qui n'a pas son pareil dans le cinéma algérien». Les deux hommes se sont d'ailleurs rencontrés pour le dernier rôle de Sid Ali Kouiret, dans le film Morituri réalisé en 2007 par Okacha Touita. Ahmed Fattani en a été le sponsor et Sid Ali Kouiret y a campé son dernier rôle pour le cinéma. Dans l'intervalle, le grand artiste a montré une exceptionnelle adaptation à tout ce qui touche au métier du théâtre et du cinéma. Il a joué d'innombrables rôles, séduit des réalisateurs d'envergure internationale, à l'image de Youcef Chahine qui l'a dirigé dans Le Retour de l'enfant prodigue, en 1976. Il a aussi tourné dans Destins sanglants, en 1980 de Kheiri Bichara. Cela n'est qu'un aperçu de son travail d'immense artiste qui restera gravé dans la mémoire de tous ses fans et ils sont des millions. Dans la soirée, le président de la République a adressé un message de condoléances à la famille du défunt, dans lequel il a salué l'homme et l'artiste qu'était le regretté Sid Ali Kouiret.
Saïd Hilmi: «Sa perte m'afflige» Je lui ai tenu compagnie à l'hôpital durant toute une semaine. Sa perte m'afflige, comme elle attriste toute la famille de la culture en général, du théâtre et du cinéma en particulier. Je suis effondré, mais je reste convaincu que le peuple algérien tout entier partage ma peine et celle de sa famille. J'ai perdu un frère, un ami, comme tous les Algériens, je me consolerais de ce qui reste à vivre de ses oeuvres. Elles resteront éternellement vivantes.
Seloua: «C'était un immense comédien» On a perdu un grand monsieur du théâtre, du cinéma et de la télévision. C'était incontestablement un immense comédien. Cette perte me donne l'impression d'être complètement brisée. Sid Ali était un artiste parfait, il respectait son travail. Il avait de bonnes relations avec tout le monde. Nous avons travaillé ensemble avec Rouiched sous la direction de Mohamed Slim Riad. Il a tout donné dans cette oeuvre. D'ailleurs, il donne toujours le meilleur de lui-même, quels qu'en soient le rôle et les circonstances. Je me rappelle qu'il campait le rôle d'un homme perdu. On y croyait presque, tellement il prenait son travail au sérieux. En tant qu'artiste, il était très discipliné. Pour retrouver un charisme comme celui de Rouiched dans cette génération, il faut vraiment chercher. Je souhaite beaucoup de courage à sa famille. Sa mémoire et ses oeuvres restent avec nous. Allah Yerhamou.
Mohamed Lamari: «C'est une grande perte pour l'Algérie» C'est une grande perte pour l'Algérie. Il laisse un grand vide. Il a marqué la culture algérienne de son empreinte. Il a fait beaucoup de films. Il a brillé à l'international, avec notamment le film de Youcef Chahine. Il laisse un grand vide pour la famille de la culture. C'était un grand ami pour nous tous. Même si nous ne pouvons pas nous dresser contre le destin, cette perte reste très cruelle.
Filmographie 1963: Les enfants de la Casbah 1971: L'Opium et le Baton d'Ahmed Rachedi 1971: Décembre de Mohamed Lakhdar Hamina 1974: L'Évasion de Hassan Terro de Mustapha Badie 1975: Chronique des années de braise de Mohammed Lakhdar-Hamina 1976: Le retour de l'enfant prodigue de Youssef Chahine 1976: Les marchands de rêve de Mohamed Ifticène 1977: Les ambassadeur de Nacer Ktari 1983: Les Sacrifiés de Okacha Touita 1991: Les Enfants du Soleil 2004: Les Suspects de Kamel Dehane 2007: Morituri de Okacha Touita
SID ALI KOUIRET EST DÉCÉDÉ HIER À L'HÔPITAL DE AIN NAÂDJA
Un monument du cinéma algérien disparaît
Par Saïd BOUCETTA - Lundi 06 Avril 2015
Taille du texte : 
Sid Ali Kouiret lors de l'une des nombreuses visites qu'il a effectuées à la rédaction de notre journal
L'Algérie perd l'un de ses illustres fils. Un artiste accompli. Un homme d'honneur, de grande générosité a fait ses adieux aux millions d'Algériennes et d'Algériens qui voyaient en lui toute cette Algérie fière, combattante et en même temps joyeuse. Sid Ali est mort. La culture est orpheline.
L'immense figure du cinéma algérien, Sid Ali Kouret, s'est éteint hier après-midi à l'hôpital militaire de Aïn Naâdja à Alger, des suites d'une longue maladie qui l'a amené à subir plusieurs interventions chirurgicales. Le défunt, né le 3 janvier 1933, avait 82 ans. Il est sans doute, l'un des comédiens les plus connus des Algériens, pour avoir, notamment campé des rôles devenus cultes, à l'image du personnage de Ali, dans le film L'opium et le bâton. L'expression «Ali mout Wakef» qui a traversé plusieurs générations, traduisant toute la philosophie de vie des Algériens, est sans conteste, l'une des scènes les plus célèbres du cinéma algérien. Il reste que le succès du film de Ahmed Rachedi, tiré du roman de Mouloud Mammeri, n'a fait que révéler le grand artiste qu'était Sid Ali Kouiret. Le grand comédien a réussi tout au long d'une très riche carrière à susciter l'admiration des amateurs de théâtre et les cinéphiles du pays. Sa propre vie est d'ailleurs un véritable scénario qui démarre sur une enfance difficile et une rencontre fortuite avec l'autre géant du théâtre national Mustapha Kateb. Nous sommes dans les années 1950. Le jeune Sid Ali, 17 ans, croise Mustapha Kateb. Sa vie est totalement bousculée. Il entre de plain-pied dans un monde qui lui ouvre les yeux sur le théâtre, lequel a été son école du patriotisme. Il intègre la troupe théâtrale du FLN. A partir de 1951, le jeune homme multipliait les expériences et se produisait à Berlin, Paris, Bucarest et passe professionnel dans la troupe de Mahieddine Bachetarzi, à Alger, avant de débarquer à Marseille, pour échapper à la DST qui suivait de trop près les activités de la troupe. Il rejoint le FLN à Paris où, en compagnie de Mohamed Boudia, Hadj Omar, Missoum et Nourreddine Bouhired, il met son art au service de la révolution. A la création de la troupe artistique du FLN, en 1958, Sid Ali en est l'une des «vedettes» et apporte sa contribution à la lutte de Libération nationale en parcourant le monde, dans des conditions, souvent difficiles. Une expérience qui forge l'homme de théâtre qu'il a toujours été et l'amène à poursuivre sur la même lancée au TNA. A partir de 1963, il renoue avec le public algérien, cette fois libre et indépendant, et montre des capacités artistiques hors normes. Très vite, il est repéré par le grand réalisateur, Mustapha Badie, qui adapte pour la télévision la pièce Les Enfants de la Casbah de Abdelhalim Raïs. Nous sommes en 1963. Le téléfilm remporte un succès phénoménal. Sid Ali Kouiret entre dans les foyers algériens et n'en sortira plus. Il a été adopté par tous ses concitoyens, dont nombreux ont pleuré lorsque, il a joué la scène de «Ali mout Wakef» dans L'Opium et le Bâton, en 1970. Immense dans l'interprétation du rôle, Sid Ali Kouiret a encore confirmé, une année plus tard dans Décembre, le film de Mohamed Lakhdar Hamina. On le cataloguait dans le drame, le grand comédien déroute son monde en interprétant brillamment son rôle dans la comédie, L'évasion de Hassan Terro de Mustapha Badie. Il aligne les rôles à succès dans de nombreux autres films, à l'image de Chronique des années de braises de Hamina et Les marchands de rêve de Mohamed Ifticène, tiré d'une enquête journalistique de Ahmed Fattani sur les milieux artistiques à Alger. Là aussi, son grand talent d'acteur a permis au public algérien de découvrir une autre facette de son jeu d'acteur sublime. D'ailleurs, confie le directeur de L'Expression, «de ce film est née une amitié profonde entre nous deux. Je garde de mon ami le souvenir d'un homme généreux et un artiste qui n'a pas son pareil dans le cinéma algérien». Les deux hommes se sont d'ailleurs rencontrés pour le dernier rôle de Sid Ali Kouiret, dans le film Morituri réalisé en 2007 par Okacha Touita. Ahmed Fattani en a été le sponsor et Sid Ali Kouiret y a campé son dernier rôle pour le cinéma. Dans l'intervalle, le grand artiste a montré une exceptionnelle adaptation à tout ce qui touche au métier du théâtre et du cinéma. Il a joué d'innombrables rôles, séduit des réalisateurs d'envergure internationale, à l'image de Youcef Chahine qui l'a dirigé dans Le Retour de l'enfant prodigue, en 1976. Il a aussi tourné dans Destins sanglants, en 1980 de Kheiri Bichara. Cela n'est qu'un aperçu de son travail d'immense artiste qui restera gravé dans la mémoire de tous ses fans et ils sont des millions. Dans la soirée, le président de la République a adressé un message de condoléances à la famille du défunt, dans lequel il a salué l'homme et l'artiste qu'était le regretté Sid Ali Kouiret.
Saïd Hilmi: «Sa perte m'afflige» Je lui ai tenu compagnie à l'hôpital durant toute une semaine. Sa perte m'afflige, comme elle attriste toute la famille de la culture en général, du théâtre et du cinéma en particulier. Je suis effondré, mais je reste convaincu que le peuple algérien tout entier partage ma peine et celle de sa famille. J'ai perdu un frère, un ami, comme tous les Algériens, je me consolerais de ce qui reste à vivre de ses oeuvres. Elles resteront éternellement vivantes.
Seloua: «C'était un immense comédien» On a perdu un grand monsieur du théâtre, du cinéma et de la télévision. C'était incontestablement un immense comédien. Cette perte me donne l'impression d'être complètement brisée. Sid Ali était un artiste parfait, il respectait son travail. Il avait de bonnes relations avec tout le monde. Nous avons travaillé ensemble avec Rouiched sous la direction de Mohamed Slim Riad. Il a tout donné dans cette oeuvre. D'ailleurs, il donne toujours le meilleur de lui-même, quels qu'en soient le rôle et les circonstances. Je me rappelle qu'il campait le rôle d'un homme perdu. On y croyait presque, tellement il prenait son travail au sérieux. En tant qu'artiste, il était très discipliné. Pour retrouver un charisme comme celui de Rouiched dans cette génération, il faut vraiment chercher. Je souhaite beaucoup de courage à sa famille. Sa mémoire et ses oeuvres restent avec nous. Allah Yerhamou.
Mohamed Lamari: «C'est une grande perte pour l'Algérie» C'est une grande perte pour l'Algérie. Il laisse un grand vide. Il a marqué la culture algérienne de son empreinte. Il a fait beaucoup de films. Il a brillé à l'international, avec notamment le film de Youcef Chahine. Il laisse un grand vide pour la famille de la culture. C'était un grand ami pour nous tous. Même si nous ne pouvons pas nous dresser contre le destin, cette perte reste très cruelle.
Filmographie 1963: Les enfants de la Casbah 1971: L'Opium et le Baton d'Ahmed Rachedi 1971: Décembre de Mohamed Lakhdar Hamina 1974: L'Évasion de Hassan Terro de Mustapha Badie 1975: Chronique des années de braise de Mohammed Lakhdar-Hamina 1976: Le retour de l'enfant prodigue de Youssef Chahine 1976: Les marchands de rêve de Mohamed Ifticène 1977: Les ambassadeur de Nacer Ktari 1983: Les Sacrifiés de Okacha Touita 1991: Les Enfants du Soleil 2004: Les Suspects de Kamel Dehane 2007: Morituri de Okacha Touita
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